Suède – Sigurd

La Saga Völsunga commence par l’histoire du héros Sigi, fils mortel d’Odin et combattant valeureux. Son fils est Réric, d’égale valeur mais il ne réussit pas à donner à la reine un fils et héritier. Mais après quelque artifice magique, sa reine donne naissance à Völsung, troisième de la lignée royale. Sa taille et sa force sont impressionnantes, il engendre dix fils et une fille ; les aînés étant Sigmund et Signy, jumeaux de sexe différents.

Par la suite, Sigmund se voit confier par Odin une épée capable de fendre la pierre et de trancher l’acier. Le destin de Sigmund se voit lier à cette épée et, grâce à elle, il acquiert une réputation exceptionnelle.
Pendant ce temps, Signy sœur de Sigumund se marie avec le roi des Goths. Mais pendant les noces Sigmund et ses neuf frères sont capturés et meurt chacun leur tour, dévorés par un loup, mère du roi. Seul Sigmund aidé de Signy survivra.
Signy, obsédée par la vengeance de ses frères, jette un charme sur son frère Sigmund qui ne se brisera qu’une fois sa vengeance achevée. Sous le charme, Sigmund fait l’amour à sa sœur et de cette relation naîtra un enfant : Sinfjolti. A eux deux, Sinfjolti et Sigmund aidé par l’épée d’Odin accomplissent leur vengeance. Signy révèle alors l’union incestueuse dont Sigmund a été “victime” puis se jette dans le brasier.

Bien après, Sigmund revendique le trône de son père, qui l’obtient. Après quelques années de règne, son fils meurt empoisonné. Comme chaque roi, Sigmund part défendre son royaume et au cours d’une bataille, Sigmund frappe de son épée la hampe de la lance tenue par un vieillard, c’est alors que l’épée se brise. Sigmund reconnaît Odin et sait que son destin est achevé. Les ennemis de Sigmund le blessent alors mortellement. Dans son dernier souffle, Sigmund dit à sa femme de ramasser les tronçons du glaive d’Odin. Car il connaît la prophétie d’après laquelle son fils obtiendra, grâce à l’épée reforgée, une récompense comme jamais mortel n’en a reçu. Maintenant sans roi, la reine part se réfugier à la cour des Danois et donne naissance à un fils, Sigurd.

Dans ce royaume travaille un maître forgeron, Regin. Doté d’un grand savoir, et à la surprise de tous puisque très secret, Regin prend Sigurd sous sa protection pour son apprentissage. Au cours d’un de ces voyages solitaires dont il avait l’habitude, Sigurd rencontra un vieil homme vêtu d’une cape et portant chapeau mou à large bord, il marchait en s’appuyant sur une lance en guise de canne. Le vieillard était borgne et son visage couvert d’une barbe grise. A Sigurd, il dit de choisir dans la prairie, au sein de son troupeau, le cheval qui lui plairait. Sigurd choisit Grani, ce qui veut dire Robe Grise, rapide comme le vif-argent. Son père est Sleipnir, étalon à six pattes d’Asgard.

Peu après cet épisode, Regin fit appeler le jeune homme et lui dit qu’il était temps qu’il lui raconte une histoire. Il lui tint alors ce discours :
“Jeune Sigurd, il est temps maintenant de me connaître pour celui que je suis. Ma naissance est d’une époque où le Temps n’existait pas. Les Géants et les Nains possédaient une force terrible ; quant aux Magiciens, ils avaient un tel pouvoir que les Dieux eux-mêmes craignaient de traverser seuls les terres de Midgard”.

“A cette époque, trois Dieux – Odin, Honi et Loki – vécurent une aventure à Midgard. Au cours d’une pêche, ils prirent un saumon et une loutre. Ils emmenèrent le saumon pour sa viande et écorchèrent la loutre pour sa peau puis arrivèrent à la demeure du Magicien Hreidmar, juste au-dessus de la forêt appelée Mirkwood. Les trois Dieux offrirent la peau de loutre à leur hôte. Sur le champ, le Magicien entra dans une colère noire. La loutre que les Dieux avaient écorché était la loutre sous la forme de laquelle le fils préféré de Hreidmar aimait à se transformer. Immédiatement, le Magicien fit enchaîner les Dieux par son puissant fils Fafnir à l’aide de la chaîne que Regin avait forgé, les Dieux devaient être ensuite mis à mort.”

“Odin prit alors la parole et réussit à convaincre qu’ils avaient tué la loutre sans savoir qui il était. En prix de cette erreur, Odin convainquit le Magicien qu’une indemnité bien mesurée devrait réussir à réparer le tort. Le Roi-Magicien fixa ses conditions : “Remplissez d’or la peau de mon fils ; ensuite, couvrez-là d’or ; quand ce sera fait, je vous accorderai la vie sauve.”
“Loki, ayant lancé la pierre fatale fut désigné pour rapporter l’indemnité. Sur le conseil d’Odin, Loki alla trouver le Nain Andvari puis lui prit son magot d’or. Il arracha également un Anneau au doigt d’Andvari. Cet Anneau était Andvarinaut, nom qui signifie “Destin d’Andvar”, car il a le pouvoir d’engendrer l’or. Si bien que le trésor d’Andvari ne faisait que grossir. A lui seul, cet anneau avait autant de valeur que tout le reste. Le Nain poussait des cris perçants : “Je te maudis pour ce que tu viens de faire. Cette malédiction, l’anneau et le trésor qu’il crée la maintiendront à jamais. Tous ceux qui posséderont, même un moment, l’anneau et son trésor seront détruits”.

“Loki s’en revint donc payer prix de la libération de ses amis et donna le magot d’or ainsi que l’Anneau à Hreidmar. Comme promis, Fafnir libéra les trois Dieux.
Le Roi-Magicien enferma le trésor dans de grands coffres de chêne, sauf Andvarinaut qu’il enfila à son doigt. La vie sembla se poursuivre comme auparavant mais l’Anneau ne cessait de tourmenter Fafnir. Advint la nuit où Fafnir coupa la gorge de son père pendant son sommeil et s’appropria l’Anneau. Depuis, Fafnir est dominé par la haine et il a mis à mort tous ceux qui ont croisé sa route. Son apparence est à l’image de son démon intérieur. Il a pris forme de serpent, d’un monstreux dragon, le plus impressionnant de cette époque et même de tous les temps.”

Sigurd rencontre Fafnir

“Telle est mon histoire conclue Regin. Tue-moi ce dragon et venge mon père. Tu en recueilleras une immense gloire. Aide-moi à récupérer ma part de l’indemnité et tu obtiendras, en plus de la gloire, l’anneau d’Andvari et la majeure partie du trésor.”
Pour cette mission, Sigurd alla demander à sa mère les tronçons de la lame paternelle offerte par Odin. Puis Regin se mit à l’ouvrage et après quelque temps les runes sacrées retrouvèrent leur brillant ; les anneaux gravés sur l’acier luisaient à nouveau comme argent, les flammes de la lumière du jour naissaient sur les tranchants de la lame. La lame retrouva tous ses pouvoirs. Gram, c’est son nom, était reforgée.

“Sigurd se mit alors en route pour affronter Fafnir. Celui-ci ne quittait son lit qu’une fois par jour pour se désaltérer dans une mare immonde. Sigurd creusa un trou et perfora de sa lame le ventre du dragon jusqu’à son cœur. Ainsi mourut Fafnir, le plus grand de tous les dragons.
Regin demanda ensuite à Sigurd d’ôter le cœur du dragon et de le faire rôtir, il affirmait qu’après l’avoir mangé, lui seul aurait à supporter la responsabilité du meurtre de Fafnir. Sigurd fit comme Regin lui demandait, il fit rôtir le cœur mais pendant la cuisson, le sang de Fafnir se répandit sur ses doigts. Sigurd se lécha les doigts et s’aperçut à sa grande surprise qu’il pouvait comprendre désormais le langage des oiseaux.

Les oiseaux fort attristés, prévinrent Sigurd du complot de Regin qui projetait de le tuer et de s’emparer de son cheval et son épée. Juste à ce moment Regin attaqua mais Sigurd, d’un coup d’épée subit, fit sauter la tête de Regin de ses épaules.”
“Sigurd emmena ensuite le trésor et l’Anneau et partit vers le pays des Francs mais seulement après avoir vécu de nouvelles aventures et vengé son père”.

“De nuit, après une longue chevauchée, Sigurd escalada une crête couronnée de flammes nommée Hindfell. Au centre du brasier, il aperçut une tour de pierre. Sigurd monté sur Grani traversa sans coup férir le rideau de flammes et là, au cœur de la tour, reposait le cercueil d’une guerrière. C’était Brunehilde, autrefois Walkyrie, bannie par Odin pour avoir osé défier sa volonté. Brunehilde condamnée à attendre qu’un héros de grand courage vienne la réveiller, ce que Sigurd accomplit. Brunehilde vit alors quel héros il était et pensa trouver son égal en courage et son maître en sagesse.

Sigurd devient son amant et sut qu’il devait aller trouver, dans les combats et les guerres, la réputation immortelle et la gloire dignes de sa bien-aimée. Pour lui prouver son amour et en guise de promesse de retour, Sigurd glissa au doigt de Brunehilde l’anneau d’Andvari. Sigurd, profitant du sommeil de sa belle enfourcha Grani et sortit du cercle de feu.
Brunehilde s’éveillant n’eut aucun souvenir mais la présence de l’Anneau lui fit dire qu’elle devait attendre la venue d’un guerrier assez valeureux pour franchir le cercle de flammes. A cet homme, et à aucun autre, elle ferait le serment de mariage.”

“A la suite de bien des aventures, Sigurd pénétra dans les pays rhénans gouvernés par le roi des Nibelungs. Sigurd, le fameux héros tueur de dragon fut accueilli avec tous les honneurs et obtint l’amitié du monarque. Les trois fils du roi – Gunnar, Hogni et Guttorm – devinrent intimes de Sigurd et se prêtèrent d’indéfectibles serments de loyauté et d’amitié.”
“Grimhild, mère de Gunnar, reine des Nibelungs vit qu’un grand profit irait à sa maison si sa fille Gudrun prenait pour mari Sigurd. Malheureusement, même si l’amour de Gudrun est acquit à Sigurd, l’inverse n’était pas de mise. Mais Grimhild est également sorcière et prépara un breuvage qu’elle fit boire à Sigurd. Le héros oublia Brunehilde et tourna son amour vers Gudrun la Belle.
Le mariage ne tarda pas et les Nibelungs accrurent leur puissance par ce mariage bienheureux. Dans le même temps, une rumeur ne cessait de s’accroître à la cour. Elle faisait état d’une vierge étrange et belle, retenue captive sur une montagne par un cercle de feu. Gunnar éprouva le désir de gagner cette vierge et d’en faire sa reine. Sur la demande de Grimhild, Sigurd accompagna son frère de sang. Avant de partir, Grimhild donna à Sigurd un philtre qui lui permettrait, si besoin était, de changer d’apparence et de devenir Gunnar. Les deux compagnons parvinrent à Hindfell. Pour franchir le cercle de flammes Gunnar éperonnait sa monture mais l’animal faillit à toutes les tentatives. Sigurd lui prêta Grani mais en pure perte. Alors Sigurd, après avoir avalé le philtre entreprit lui-même de rejoindre le centre de la montagne. Puis Brunehilde et Sigurd se firent face, sans se reconnaître. “- Qui donc êtes-vous ? -Mon nom est Gunnar de Nibelung et je vous réclame pour ma reine”. Le prix de la main de Brunehilde était le franchissement des flammes, le prix est payé, Brunehilde ne pouvait refuser le héros qui l’avait accompli. Brunehilde tendit l’anneau d’or d’Andvari et ils passèrent trois nuits dans la Tour. Mais Sigurd, pour ne pas trahir Gunnar et ne pas déshonorer sa fiancée posa, à chacune des nuits, sa longue épée entre eux. Plus tard, quand on célébra le mariage de Brunehilde et de Gunnar, ce fut le vrai Gunnar qui honora Brunehilde à l’autel puis à la couche nuptiale. Les jours passèrent et l’entente régnait au pays des Nibelungs.”

“Mais un jour alors que les deux reines se baignaient dans un fleuve, elles en vinrent à se disputer. Brunehilde vanta Gunnar comme supérieur à Sigurd, ne serait-ce que parce qu’il avait accompli l’exploit de franchir le cercle de feu. Mais à cet argument, Gudrun n’avait que faire car Sigurd lui avait révélé toute la vérité, et avec une certaine cruauté Gudrun exhiba l’anneau d’or d’Andavi que portait sa main, preuve de la supercherie. Courroucée par cet affront, Brunehilde alla trouver Gunnar et ses frères et railla son mari en le qualifiant de couard avant de le menacer et de lui dire que chaque homme pense que Gunnar a gagné sa femme par l’entreprise d’un autre et que non seulement content de se faire passer pour Gudrun, Sigurd a également pris place dans la couche nuptiale de l’ancienne Walkyrie.”
“Le jeune Guttorm, l’esprit enflammé par ses deux frères se résolut à tuer Sigurd. Dans la nuit, il enfonça son épée dans l’homme qui le traversa. Sigurd, dans un dernier geste, lança violemment son épée terrifiante vers Guttorm qui s’enfuyait. Celui-ci fut coupé en deux. Brunehilde riait de sa vengeance. Mais sans joie. Le remords fit son œuvre et Brunehilde se suicida avec l’épée de Sigurd. Unie dans la mort à défaut de la vie. Sigurd et Brunehilded furent couchés côte à côte et les flammes de leur bucher funèbre eurent tôt fait de les consumer. Ainsi s’acheva l’existence de Sigurd tueur du dragon.”

“Mais Andvarinaut est toujours au doigt de Gudrun, la malédiction d’Andvari n’est pas terminée. Quant au trésor du Nain, Gunnar et Hogni s’en sont emparé et l’ont caché dans le Rhin, à l’intérieur d’une caverne connue d’eux seuls.”
“Gudrun, remplie d’horreur par la mort de Sigurd et le rôle de ses frères dans son assassinat entreprit elle aussi de se venger. Mais sa sorcière de mère veille et une fois encore, administra un philtre à l’insu de Gudrun qui eut pour effet de l’emplir d’amour et de fidélité à l’égard de ses frères. Gunnar et Hogni sont toujours occupés à accroître leur pouvoir et dans ce sens donnèrent leur sœur en mariage à Atli, roi des Huns. Atli puissant monarque, mais néanmoins plein de cupidité a entendu parler du trésor de Sigurd… Le temps passa et Gudrun donna deux fils à Atli. Puis Atli se décida à passer à l’action et invita Gunnar, Hogni et tous les seigneurs Nibelungs à une fête en ses murs.

C’est là que tous les Nibelungs furent mis à mort à la seule exception de Gunnar et Hogni, maintenus en vie pour avouer l’endroit où se cache le trésor. Les deux frères jurèrent, sur la foi d’un serment échangé entre eux, de ne jamais révéler l’emplacement de la caverne. Gunnar est d’autant plus résolu à ne dire mot que la tête tranchée de Hogni est tantôt amené à lui. “- Il n’y a jamais eu de serment. Je craignais seulement qu’Hogni pût troquer le trésor contre sa vie. Maintenant que vous avez tué mon frère, je suis seul à connaître le secret ! Jamais je ne le révélerai.” Saisi d’un accès de rage, Atli mit fin à la vie de Gunnar.”

“Gudrun, une nouvelle fois, eut le cœur empli de douleur par la mort de ses frères. Et cette fois, aucun philtre ne pouvait plus s’opposer. Décidée qu’elle était à venger l’anéantissement des Nibelungs. Atli fêta dans son palais sa victoire sur les Nibelungs. Gudrun commença par tuer ses deux enfants, fils d’Atli puis mêla leur sang au vin, embrocha et rôtit leurs entrailles et donna le tout à son mari. La nuit tombée, elle coupa la gorge du roi hun dans son sommeil et termina par mettre le feu au grand palais. S’ensuivit le plus grand bûcher jamais vu au pays des Huns, cause de la mort de tous les soldats et vassaux d’Atli.”

Peu à peu, la folie envahit Gudrun tant ses souvenirs étaient effroyables. Elle quitta le pays, et se dirigea vers une haute falaise, ou elle contempla l’anneau rayonnant d’Andvari pour une dernière fois puis, en soupirant, emplit de pierres sa tunique et sauta dans la mer.