Le Match de Noël – France vs Angleterre en 5 rounds

Ces chroniques ont été publiée en version originale en Décembre 2016 sur le site du PetitJournal.com.
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Durant les fêtes, LePetitJournal.com de Londres a décidé d’organiser un grand match opposant les traditions anglaise et française. Des coutumes qui animent Noël et le Nouvel An de chaque côté de la Manche. Cette « rencontre » inédite a lieu en cinq manches.

Round 1 - Christmas Pudding contre Bûche de Noël

A Noël, aucun repas britannique ne serait complet sans son Christmas Pudding. De même qu’aucun dîner français ne saurait se clore sans sa fameuse bûche. Mais pour tout voyageur qui se présente, quelles étranges traditions culinaires ! Au Royaume-Uni, cela fait près d’un mois, depuis le fameux Stir-up Sunday, que l’on arrose régulièrement son Christmas Pudding à grande dose de Brandy pour l’imbiber, et s’imbiber par la même occasion, de cet alcool doré. La consistance du Christmas Pudding est pour le moins surprenante, mais, dans un gentil pot-pourri, son goût relève les parfums délicats de la cannelle, de la muscade, des clous de girofle, du gingembre et d’autres épices. Les Anglais font bien les choses : le très victorien Christmas pudding viendrait absorber les excès de vin d’un repas de Noël souvent bien arrosé.

Les Français font tout aussi bien les choses. La glace légère de la bûche de Noël vient, elle, faire glisser au forceps les excès d’un repas souvent gargantuesque. Depuis quelques années, elle remplace le traditionnel gâteau roulé -génoise et crème au beurre-, nettement plus bûche, que l’on trouvait déjà au XIXem siècle dans le Poitou-Charentes. Mais pourquoi donc déguster « un morceau de cette chose longue et molle », pour paraphraser le Père Noël est une ordure, dont on devine vaguement qu’elle vient représenter un morceau de bois ? Quel plaisir à se rappeler une bûche, élément lourd s’il en est, au moment où l’on aimerait peut-être oublier la lourdeur des plats que l’on vient de s’enfiler, petites sauces d’accompagnement comprises ?Et, surtout, que vient faire ce nain en plastique sur mon dessert ?

Pour l’effort de préparation : Avantage Christmas Pudding

Pou la relative légèreté du goût : Avantage Bûche de Noël

Pour la forme improbable : Avantage Bûche de Noël

Round 1 – Avantage France

Round 2 – We Wish you a Merry Christmas contre Petit Papa Noël

Vous pensiez vous en tirer cette année ? Oh non, ne vous en faites pas : ils seront bien là, les bambins, à vous agresser les tympans devant le sapin, au son des chants de Noël franchouillards, ou des Christmas Carols so british ! Mais regardons de plus près. Côté français, les garnements ne manqueront pas d’entonner « Petit Papa Noël ». Cela fait depuis 1946, et la voix chevrotante de son compositeur Tino Rossi, que ça dure. Il n’y a pas de raison que cela change. Bon, soyons honnêtes, pour l’aspect laïc, il faudra repasser. La chanson, un peu prosaïque, ne dit-elle pas : « A genou les petits enfants / avant de fermer les paupières / ils font une dernière prière ». Passons. Mais quelqu’un peut-il surtout m’expliquer : « Dehors, tu vas avoir si froid, c’est un peu à cause de moi » ? Sans verser dans le climato-scepticisme, as-t-on vraiment idée de l’impact des enfants sur le froid hivernal ?

Côté britannique, on est plutôt dans le registre jovial. Et c’est tant mieux. Simple, pratique, esthétique, compact -et laïc !- « We wish you a Merry Christmas » délivre le message souhaité dans sa forme la plus optimale. Les agences de communication n’ont pas fait mieux depuis l’invention de ce slogan d’avant-garde au XVIe siècle. Et, puis, tant qu’on y est dans les vœux, autant aussi souhaiter la bonne année. Un « deux en un » pour le moins pratique ! « We wish you a Merry Christmas », donc, « And a Happy New Year ! »

Pour l’approche laïque : Avantage We Wish you a Merry Christmas

Pour l’effort d’inventer des paroles non-répétitives : Avantage Petit Papa Noël

Mais pour des paroles qui ne versent pas dans l’autoflagélation : Avantage We Wish you a Merry Christmas

Round 2 – Avantage Royaume-Uni

Round 3 – Cheers ! contre Santé !

En cette période d’incertitudes brex-hésitantes, Noël devrait être l’occasion de trinquer ensemble, de part et d’autre de la Manche… C’est pourquoi nous allons paradoxalement vous parler maintenant d’empoisonnement ! Comme vous le savez, au Moyen-Âge, l’empoisonnement était monnaie courante. Proposer un toast, faire claquer les verres les uns contre les autres pour s’échanger un peu de boisson étaient alors une manière pour les convives de s’assurer que le contenu de leur verre n’était pas toxique. On disait alors « Santé » pour montrer bonne intention, et les Français ont gardé la coutume à ce jour. Mais, grands cosmopolites de ce monde (ah bon ?), les Français utilisent aussi “Tchin–Tchin” pour trinquer. Bon, à la base, c’est surtout parce que les soldats français qui rentrèrent de la deuxième guerre de l’opium en Chine n’avaient pas bien compris l’expression chinoise “qing qing” qui signifie “s’il vous plaît”. Sacrés polyglottes ! Vous ne me croyez pas ? Pourquoi donc, alors, les Français auraient-ils inventé le verbe « trinquer » à partir du verbe allemand « trinken » qui veut dire « boire » ?

Bon, et les Anglais dans tout ça ? Le mot “cheer” en lui-même, vient du mot latin pour “visage” ou “contenance” et désignait à l’origine une expression du visage, gaie ou joviale. Au fil du temps, cependant, il a évolué pour davantage signifier la joie et a été utilisé comme un cri d’encouragement ou de soutien à partir de 1720. En tant que toast, “Cheers” est apparu seulement au début du XXe siècle. Quant à savoir pourquoi on s’est mis à faire clinquer les verres en même temps, les Britanniques ont quelques théories : le bruit des chopes s’entrechoquant ferait en fait fuir les mauvais esprits…

Pour l’approche polyglotte : Avantage « Santé ! »

Pour les croyances loufoques : Avantage « Cheers ! »

Pour l’expression de joie plutôt que l’assurance de non- empoisonnement : Avantage « Cheers ! »

Round 3 – Avantage Royaume-Uni

Round 4 – Auld Lang Syne contre Patrick Sébastien

Autant vous le dire tout de suite, cette manche est très mal engagée pour la France… Mais de quoi s’agit-il au juste ? Des chants traditionnels pour le Nouvel An ! « Ah bon, il existe un chant traditionnel pour le Nouvel An ? », pense le Français. Oui. Quiconque a déjà passé le Nouvel An à Londres sait que, autour de minuit, les Britanniques se rassemblent en foule compact et essayent de chanter une vieille chanson écossaise, le Auld Lang Syne. Toute la foule s’époumone et se croise les bras en une longue chaine humaine qui se balance de droite à gauche. Autant se l’avouer, cela a un peu l’air de la version dont on danse des Lacs du Connemara de Sardou. Version debout. Et version bourrée (« ah bon, Lacs du Connemara se chantent aussi à jeun ? »). Oui, donc version debout. Mais, évidemment, peu de Britanniques connaissent en fait véritablement les paroles. Ce qui n’est pas si grave, puisque l’ambiance est là.

Bon ! Et les Français dans tout ça ? Alors, on a beau chercher, mais, ce qui (malheureusement) se rapproche le plus d’un chant du Nouvel An serait une chanson de Patrick Sébastien, comme on peut d’ailleurs avoir la chance de l’entendre sur France Télévision à la Saint Sylvestre. Oui, ça pique un peu les yeux de lire ça. Et, je ne parle même pas des oreilles. Que nos amis britanniques qui nous lisent peut-être ne s’y méprennent pas : il y a par contre l’embarras du choix ! « On fait tourner les serviettes », « on est des dingues », « ça va bouger », « et c’est ce soir », « les sardines », la liste est longue… Sans oublier, évidemment « le petit bonhomme en mousse ». Oh mon dieu, je n’aurais jamais cru devoir un jour faire l’inventaire du répertoire de Patrick Sébastien… Vite, un Eurostar…

Pour la convivialité (entre bourrés) : Avantage Auld Lang Syne

Pour l’authenticité (entre bourrés) : Avantage Auld Lang Syne

Pour la respectabilité (entre bourrés) : Avantage Auld Lang Syne

Round 4 – Forfait France – Avantage Royaume-Uni 

Round 5 – Hogmanay contre Vendange tardive

Satané centralisme à la française ! Il n’y a d’yeux que pour Paris et pour Londres !  Nous vous parlions hier du nouvel An dans les capitales, direction aujourd’hui l’arrière-pays pour voir comment on y fête le grand bond de la Saint Sylvestre. Tiens : prenons, au hasard, Midi-Pyrénées… Saviez-vous que dans la ville de Viella, l’on a une façon bien à soi de célébrer le Nouvel An ? Après une journée de repas bien arrosés, les habitants du village empoignent des torches enflammées, se mettent en procession dans la pénombre ou montent dans des calèches. On pourrait croire qu’ils partent à la chasse de Dracula, mais c’est plutôt après Bacchus qu’ils en ont, car, une fois arrivés dans les vignes, ils entament une improbable vendange nocturne, où il est davantage question d’abuser du vin chaud que de préparer le prochain millésime… Le terme « vendange tardive » n’aura en tout cas jamais été plus a propos…

Mais attendez, qu’est-ce qu’ils ont tous, ces Ecossais, à courir comme des dépravés, au jour de l’An ? Ne vous inquiétez pas, c’est Hogmanay, le nouvel An écossais qui, prenons-le pour acquis, n’a nul équivalent de par le monde. Selon la coutume du first footing, il « suffit » de s’élancer dans une course, juste après minuit, pour être la première personne à franchir le seuil de la porte d’un ami. Allez, comme dit la chanson, « mets tes baskets, chouette, c’est sympa tu verras ». Bon, comme on ne va pas chez ses amis les mains vides, mieux vaut apporter quelques cadeaux symboliques, comme de la nourriture, ou du whisky (Bah oui, pas bêtes les Ecossais !). Ces cadeaux sont, selon la croyance, destinés à porter chance pour l’année à venir (ou en tout cas, une belle gueule de bois). Et puis, si vous avez la chance d’être grand et brun et que vous arrivez premier : grand bien vous en fasse ! Il parait que vous portez davantage chance à votre hôte… Ils sont fous ces Ecossais !

Pour la fête sans effort : Avantage Vendange tardive

Pour les superstitions loufoques : Avantage Hogmanay

Pour la fête sans effort de nouveau (non vraiment, on ne va pas courir au Nouvel An) : Avantage Vendange tardive

Round 5 – Avantage France

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